Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
Je m’appelle Grégory Rousseau, je suis Product Owner depuis 3 ans chez AVSimulation. Je suis chargé de définir la feuille de route, de suivre l’avancement des développements tout en anticipant ou en écoutant les besoins présents ou futurs des clients. Par ailleurs, je suis en charge de certains projets comme SERKET pour RUAG Défense France, qui développe un simulateur pour la DGA, dans lequel nous intégrerons des interfaces logicielles développées par notre équipe.
Pouvez-vous expliquer l’acronyme HiL ?
HiL signifie Hardware in the Loop, ou Matériel dans la Boucle. Un banc HiL – généralement appelé banc HiL – consiste à faire fonctionner un élément physique (capteur ou actionneur) dans une boucle de simulation.
Aujourd’hui, tous les véhicules contiennent des ECU, qui sont des systèmes définis par des entrées et des sorties, et qui intègrent des lois de contrôle chargées de réguler des systèmes (tels que les ADASla climatisation, les systèmes d’éclairage, etc.).
Concrètement, il s’agit de tester un ECU sur un banc avant de l’installer dans un véhicule. Pour cela, il est nécessaire d’alimenter les entrées de l’ECU avec des mesures virtuelles (provenant d’une boucle de simulation) et ainsi observer l’évolution de ses valeurs de sortie. En d’autres termes, l’ECU recevra des informations de capteurs simulés et agira sur des actionneurs,ou donnera des instructions à d’autres ECU.
Un exemple simple est celui d’un levier de vitesses d’une boîte de vitesses pilotée, manipulé par une personne : un capteur récupère la position du levier de vitesses et transmet l’information à l’ECU (demande de changement de vitesse du conducteur). En retour, et si les conditions de validité sont vérifiées, l’ECU activera un système de changement de vitesse. Pour un tel système, le banc HiL peut être utilisé pour tester et valider soit le capteur de changement de vitesse, soit l’actionneur de la boîte de vitesses.
Les exemples liés aux ADAS sont souvent plus complexes, impliquant différents capteurs (réels ou simulés) et un ordinateur qui procédera éventuellement à la fusion des données multi-capteurs pour valider le choix d’un point de consigne.
Pouvez-vous aussi expliquer brièvement MIL, SIL, DIL ?
MiL : Model in the Loop. Il s’agit d’un modèle de test qui n’est pas compilé. Il ne répond pas encore à toutes les contraintes d’utilisation et d’intégration d’un logiciel embarqué (fréquence de fonctionnement définie, couches basses, etc.). En d’autres termes, c’est un produit un peu brut qui permet de développer la loi de contrôle et de réaliser les premiers tests : seul l’algorithme du système embarqué est évalué.
SiL : Software in the Loop. Pour ce type de test, des lois de commande compilées sont utilisées, homogènes à ce qui sera dans l’ECU. Ces lois de commande constituent le logiciel embarqué. Le reste de l’environnement, y compris la partie matérielle du logiciel embarqué, reste simulé.
DiL : Driver in the Loop. Ici, il s’agit d’un test utilisé lorsqu’un simulateur piloté par un conducteur est intégré dans la boucle de simulation. Dès qu’une personne physique contrôle quelque chose pendant la simulation, on parle de DiL. L’objectif de ce type de banc est d’évaluer les réactions du conducteur face à un événement qui se produit (affichage d’informations, émission sonore d’un signal de prévention ou d’alerte, etc.).
Existe-t-il une alternative aux bancs de test HiL ? Comment les ingénieurs faisaient-ils avant leur apparition ?
Les bancs HiL peuvent être utilisés pour tester des ECU (Unités de Contrôle Électroniques) avec des lois de contrôle intégrées ou des capteurs. Cela est entièrement lié à l’émergence de l’électronique dans le domaine automobile : auparavant, les tests mécaniques suffisaient. L’industrie automobile était beaucoup moins mature qu’aujourd’hui. Les constructeurs automobiles concevaient donc des véhicules prototypes et les testaient sur piste, avec un nombre limité de tests, ne serait-ce qu’en raison du faible nombre de prototypes.
Lorsque l’électronique a commencé à apparaître, des bancs de test ou des tests en laboratoire ont été réalisés comme alternative aux bancs HiL. Les bancs de test permettent d’isoler une partie du véhicule pour la tester de manière unitaire en alimentant l’ECU avec des données virtuelles.
Quels types de problèmes les bancs de test HiL peuvent-ils résoudre ?
Les bancs HiL résolvent plusieurs problèmes. Tout d’abord, ceux liés au coût : les tests sur piste sont particulièrement coûteux. Les bancs HiL représentent un investissement initial, mais ils sont ensuite peu coûteux à entretenir, et peuvent être reliés à différents produits à tester ou valider. Ils deviennent donc très rapidement rentables en termes d’économies réalisées. De plus, ils permettent de gagner beaucoup de temps. Par exemple, si nous souhaitons tester des lois de contrôle sur un capteur qui n’est pas encore développé ou en cours de développement. Ce dernier, qui n’a pas encore été libéré, peut être testé à l’avance grâce à la simulation. Enfin, les problèmes de répétabilité sont évités. En effet, il est possible de répéter le même scénario à l’infini, sans subir les variations (humaines ou matérielles) inhérentes à un test réel.
Où se situent les bancs HiL dans le cycle en V ?
Dans le cycle en V, il y a d’abord, lors de la phase de conception, le MiL. Cela consiste à avoir des modèles qui ne sont pas encore bien structurés ou capables d’être compilés. C’est plutôt la qualité des algorithmes qui est testée à ce stade. Peu à peu, les modèles seront améliorés, puis industrialisés pour être compilés et utilisés dans le SiL, tels qu’ils sont lorsqu’ils sont intégrés dans un ECU. Lorsque l’on remonte le cycle en V pour la phase de test et validation, le HiL intervient, pour connecter un système réel à une boucle de simulation, afin de le tester. Enfin, le ViL sera utilisé pour tester le véhicule et ses capteurs en temps réel, partiellement alimenté par un environnement simulé.
Quelles sont les caractéristiques qui permettent à SCANeR d’être utilisé dans un banc de test HiL ?
Nous avons le module RTGateway qui permet de connecter SCANeR à une cible en temps réel et de récupérer toutes les informations (capteurs par exemple) qui transitent sur le réseau SCANeR.
D’autre part, chez AVSimulation, nous avons développé un modèle de dynamique de véhicule, nommé CALLAS RT, qui est également capable de fonctionner sur une cible en temps réel, donc sur un banc HiL.
Aujourd’hui, ce sont les produits intégrés dans le pack Real Time Targets, qui permettent d’utiliser SCANeR connecté à une cible en temps réel, sur laquelle le modèle de dynamique de véhicule CALLAS RT peut fonctionner, afin de l’interface avec différents systèmes (capteurs ou actionneurs). Cet ensemble constitue le banc HiL, avec SCANeR comme boucle de simulation.
Pouvez-vous nous donner des exemples de capteurs intégrés dans des bancs HiL et des exemples de bancs que vous avez construits ou sur lesquels vous travaillez ?
Un exemple de banc de capteurs HiL peut être conçu avec une caméra.
Le principe est de projeter l’image SCANeR sur un écran, qui est ensuite filmé avec une caméra. Cette caméra est installée dans une boîte (une sorte de caisson d’environ 1 à 2 m³) et ajustée pour filmer l’écran. L’idée est d’émuler une scène réelle, via l’image SCANeR, et de la filmer avec la caméra comme si elle était installée sur un pare-brise de voiture.
Ces caméras sont capables de détecter des cibles (présence d’un véhicule, vitesse, distance inter-véhicules) afin d’être utilisées pour des fonctions telles que le ACC (régulateur de vitesse adaptatif). Connectée à un banc en temps réel lui-même relié à SCANeR, la caméra transmet les cibles détectées et leur vitesse : ce banc HiL devient un banc de test et de validation pour les fonctions ADAS, grâce à la simulation.
Un autre usage d’un banc HiL est son utilisation avec un radar. De la même manière que nous émulons une image du monde réel via un écran, l’idée est d’émuler les ondes d’un radar qui sont réfléchies par une scène réelle : cela se fait à l’aide d’un banc radar. Alimenté par un modèle de capteur radar tel que le modèle radar SCANeR L2, le banc radar peut envoyer des ondes qui sont ensuite reçues par un capteur radar réel. En utilisant une couche de traitement des échos Doppler, le radar fournit les cibles détectées à un système ADAS. Dans un banc de test HiL entièrement bouclé, le système ADAS est connecté à un véhicule SCANeR et peut être testé pour valider son fonctionnement dans des scénarios menant à des situations d’accidents.
Dans un de nos projets, nous avons travaillé avec notre partenaire Conrad pour connecter le banc de test de caméra avec SCANeR. Sur ce dernier, la connexion HiL est mise en œuvre avec une caméra Mobileye connectée à une cible en temps réel qui acquiert le flux vidéo et les diverses informations envoyées par la caméra.
Plus récemment, avec Keysight Technologies et le soutien d’OKTAL SE, nous travaillons sur un projet pour démontrer l’utilisation d’un radar L2 dans une application de banc radar.
Un mot pour conclure ?
Le ViL et le HiL sont des éléments clés de notre feuille de route SCANeR, c’est pourquoi nous travaillons depuis plusieurs années à être compatibles avec un certain nombre de fournisseurs de cibles en temps réel tels que National Instrument, dSpace, et bien d’autres. Le fonctionnement de notre modèle de véhicule CALLAS tel que nous l’utilisons dans des simulations massives sera le même lorsque nous l’utiliserons sur une cible en temps réel : nous travaillons pour converger au mieux vers la Continuité Numérique.